En 1789 Louis Lourdel (prieur) et André Vollet (sous prieur) et quelques autres moines donnèrent leurs procurations aux Etats Généraux où il fut question de la vente de leurs biens.
Il fut difficile de vendre le bâtiment et les terres qu'il lui restait encore. Les P.P. Boulanger et Gruson et le Prieur après un rattachement à St Vaast d'Arras reçurent comme indemnité de pension: 900 livres aux 2 premiers et 4714 pour le 3e.
Le prieuré avait pour armoiries : d'argent à une croix St André de gueules sur laquelle est attaché le saint en carnation, la tête ornée d'un nimbe d'or, vêtu de pourpre, ceint d'une ceinture d'or, les mains et les pieds attachés d'une corde de même."
Ce sont des extraits du livre écrit par Michel Paques, Eugène Peru, Jean Pierre Roger
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Représentation de la présentation du livret à partir duquel j'ai extrait le texte ci-dessous |
Witrinio, Witres, Witre, Witternesse, Biterne. Ce village existait avant l'invasion des Normands de la fin du ix siècle. Il était au nombre des possessions de l'Abbaye de Saint-Bertin. Le nom de Bilerne se trouve dans Froissart. Cet historien nous dit que l'armée anglaise, commandée par le duc de Buckingham, logea en ce lieu au mois de juin 1380.
Les notes qui suivent, sur Witternesse et sur le Prieuré de Saint-André, nous ont été communiquées par M. Paris, curé de cette paroisse.
Le village de Witternesse, situé au nord-ouest et sur les limites de l'arrondissement de Béthune, arrosé par la Laquette, rivière dont les sources sont à Febvin, à Boncourt et à Bomy, est une commune du canton de Norrent-Fontes. Ce village, assis dans une plaine basse et humide, mais saine, traversé par la Laquette, qui y fait tourner un moulin, se compose de trois rues bordées de maisons, et d'un groupe d'habitations qui entourent de vastes prairies. Le terroir est gras et fertile; on n'y voit aucun caillou, on n'y connait pas la jachère; il produit toute espèce de céréales; les graines oléagineuses, telles que le lin, l'œillette, le colza, la cameline et même le sénevé y viennent abondamment.
Mais si le terroir est riche par son sol, et rafraichi par des eaux salubres, qui fournissent une rivière et nombre de petits ruisseaux, si des prairies et des oseraies agréablement variées viennent ajouter encore à la richesse du sol, d'un autre côté, le pays est privé de bois. La population de Witernesse est de 605 habitants. Après cette topographie de la commune que j'ai cru nécessaire pour bien se faire une idée de ce village, nous allons décrire la paroisse dans son état ancien et actuel.
L'église de Witternesse, dédiée à saint Martin de Tours, était, avant la Révolution de 1790, une paroisse dépendante du prieuré de Saint-André-sur-Laquette, et du diocèse de Saint-Omer. Le curé était toujours un religieux de ce prieuré; il ne résidait pas dans la paroisse. Un vicaire séculier, résidant dans la paroisse, remplaçait le curé régulier dans les détails du ministère pastoral. La maison vicariale était dans l'emplacement du presbytère actuel. Le prieur nommait un de ses religieux à la cure vacante, et le choix était confirmé par l'évêque de Saint-Omer.
Aujourd'hui, depuis le Concordat de 1802, la commune de Witternesse et celle de Quernes forment une succursale, faisant partie du canton de Norrent-Fontes. La population de la paroisse est de 980 habitants, aujourd'hui confiée à un seul prêtre, et avant la Révolution, à trois prêtres, comme on le verra dans la suite.
On a déjà vu que Witternesse avait un curé régulier et un vicaire, sans parler des autres religieux du prieuré, qui venaient assister le pasteur à certaines occasions.
L'église de Witernesse, d'après une pierre insérée dans un mur latéral, paraît avoir été bâtie ou au moins restaurée en 1630; elle n'a pas de nefs latérales; l'unique nef est assez large, et est éclairée par huit fenêtres, mais la voûte est basse.
La Révolution de 1792 avait épargné l'église, mais la main du temps fut plus impitoyable que celle du vandale moderne. Le clocher, qui était une flèche en pierre blanche sans jour, assis sur le chœur de l'église, s'écroula subitement dans les dernières années de la Révolution, et, dans sa chute, écrasa le chœur et la sacristie. Le chœur fut reconstruit avec simplicité, peu après le Concordat; il est éclairé par deux fenêtres de chaque côté, terminé par un plafond et bâti de forme cintrée. Le clocher n'est pas encore relevé de ses ruines, rien ne l'a remplacé, une cloche forte et sonore est restée ensevelie dans le grenier de l'église.
La sacristie n'a pas encore reparu, de sorte que l'église de Witternesse est sans clocher et sans sacristie. Un cimetière couvert d'ormes entoure l'église.
L'intérieur de l'église est bien dégagé; on n'y voit rien de remarquable; il y a deux autels latéraux de la Sainte Vierge et de saint Nicolas; l'église possède une relique de saint André.
Il y a en outre, dans l'église, deux statues de bois: l'une de saint Antoine, abbé; l'autre, de saint Quentin, martyr. La dévotion des fidèles et même des pèlerins y fait brûler des chandelles journellement.
Il n'existe aucun monument qui indique pourquoi l'église est dédiée à saint Martin; il y a seulement, près du cimetière, une source, qu'on nomme Fontaine de saint Martin.
Quant aux revenus de l'église, ils peuvent s'élaver à 280 fr. par an; sur cette somme, on doit prélever les frais ordinaires du culte. >
PRIEURE DE SAINT-ANDRE-SUR-LAQUETTE.
Avant la Révοlution de 1789, il existait sur la paroisse de Witernesse, un prieuré d'hommes, nommé Saint-André, dont la Laquette arrosait l'enclos. Ce prieuré était de l'ancienne congrégation de l'abbaye d'Arrouaise, près Bapaume, sous la règle de saint Augustin, de la province d'Artois, du gouvernement d'Aire, soumis à l'évêque diocésain de Saint-Omer, mais indépendant de toute abbaye.
Vers l'année 1202, sous Lambert, évêque de Térouane, l'évêque diocésain, un noble et puissant seigneur, nommé Robert, seigneur de Chresèques, aujourd'hui Crecques, hameau et annexe de Mametz, possédait une terre, près Witernesse, appelée alors Maugré (Cette terre porte encore aujourd'hui ce nom; c'est une ferme tenue en fief, pour me servir de l'expression ancienne, et occupée depuis longtemps par une famille respectable, M. Rolin. On dit encore, comme il y a plus de 600 ans, la ferme du Maugré.), qu'il tenait en fief dudit évêque. Il y fit bâtir une maison, non loin d'une chapelle dédiée à l'apôtre saint André, et qui était déjà ancienne, el entourée d'un petit cimetière. Il est vraisemblable qu'il existait là, dans ce temps, un petit hameau. dont il ne reste plus aujourd'hui aucun vestige.
Quelques années après, quatre clercs attachés à la collégiale de Saint-Pierre, à Aire, dégoûtés du monde, et voulant se consacrer à Dieu d'une manière toute particulière, prirent la résolution de se retirer en un lieu solitaire. On ne sait si ces clercs étaient prêtres; le mot clerc est employé par l'historien Locrius pour les désigner. Ils choisirent donc cette chapelle de Saint-André, située à une demi-lieue de la ville d'Aire, sur les bords de la Laquette, et alors peu connue et inaccessible, même à la multitude.
Ils obtinrent du seigneur de Crecques un terrain qui entourait la chapelle, sur lequel ils construisirent une maison. Lorsque leur maison fut bâtie, les quatre clercs, la veille de la fête de saint André, 29 novembre, prirent l'habit religieux et firent leurs vœux sous la règle de saint Augustin. Ils choisirent cette règle à l'exemple des chanoines réguliers de Saint-Victor, à Paris, vulgairement appelés Genovéfains, auxquels ils furent longtemps soumis.
Dès l'année 1206, cette maison prit le nom de Prieuré, et Odon en fut le premier prieur. Les registres de l'église collégiale d'Aire de cette année 1206, font mention qu'Odon, prieur de Saint-André, donna au chapitre douze rasières de blé et quatre chapons; sans doute en reconnaissance du fond de son prieuré, dont le chapitre était le haut-seigneur.
Ce Prieuré acquit bientôt de l'importance par les dons et les largesses des fidèles; le nombre des religieux augmenta; et, environ trente ans après sa fondation, le pape Grégoire IX approuva, par un diplôme, cette congrégation naissante.
Pierre de Chrésèques ou Crecques, fils de Robert, fondateur du prieuré de Saint-André, étant devenu prévôt de la collégiale d'Aire, fit un voyage à la Terre sainte et y mourut le 23 juillet 1218. Sa mère fit rapporter son corps en France, et elle obtint qu'il fut inhumé dans l'église du prieuré de Saint-André, sous une tombe de marbre. Les religieux chantaient, chaque année, le 22 décembre, un service solennel pour le repos de l'âme de ce prévôt. Ce service, dit l'histoire du temps, était précédé des vigiles à neuf leçons.
En 1641, pendant le siège de la ville d'Aire, qui fut prise par le maréchal de la Meilleraie, commandant l'armée française, le 27 juillet, ce maréchal destina le prieuré de Saint-André au service des malades et des blessés. Cette destination ne laissa pas de faire quelque tort aux bâtiments du monastère.
En 1710, dans la guerre de la succession d'Espagne, qui replongea la France dans les horreurs de la guerre, l'armée des alliés, commandée par le général Marlborough. Ce célèbre guerrier anglais, dont le nom est devenu si populaire en France, après avoir échoué devant Arras, défendu par le maréchal de Villars, vint faire le siège de Béthune, qui fat forcé de capituler le 20 août. Après la prise de Béthune, Marlborough résolut d'assiéger Aire; et, dès le 2 septembre suivant, il plaça son quartier général à Saint-André. Après cinquante-neuf jours de tranchée ouverte, Aire se rendit et la capitulation de la ville et du fort Saint-François fut signée au prieuré, qui était le quartier-général anglais, le 9 novembre.
En 1740, le prieur et tous les religieux du prieuré vinrent processionnellement, en grande pompe, rendre leurs hommages å Notre-Dame Panetière, dont la statue, encore aujourd'hui existante, resta exposée dans la collégiale de Saint-Pierre, depuis le 6 juin jusqu'au 15. Cette procession de Saint-André, dont on n'avait pas eu d'exemple, avait attiré un immense concours.
Dom Lourdel Gabriel, élu en 1779 à l'âge de 33 ans, gouverna le prieuré jusqu'à sa suppression, en 1789; il fut le dernier prieur, et mourut à Saint-Omer, le 2 novembre 1813, âgé de 67 ans.
A la révolution de 1789, le prieuré de Saint-André-sur-Laquette eut le sort de tous les autres monastères; les bâtiments furent vendus, l'église fut rasée, et le corps de logis est aujourd'hui une maison de campagne. Ainsi a disparu le prieuré de Saint-André, après environ 600 ans d'existence, et avec lui ont disparu les aumônes et les secours multipliés que cette maison répandait sur les pauvres et les infirmes.
Lorsque le calme fut revenu, et que l'église de France sortit de ses ruines, le village de Witternesse, qui était du diocèse de Saint-Omer, et le village de Querne, du diocèse de Boulogne, formèrent une seule paroisse. Mgr Charles de La Tour-d'Auvergne Lauraguais, premier évêque d'Arras depuis le concordat de 1801, nomma à cette paroisse un religieux du prieuré de Saint-André, M. Bonaventure-Jean-Baptiste Roussel, qui la gouverna 29 ans, jusqu'au 1 janvier 1832, époque où des infirmités forcèrent ce bon religieux à se démettre; il mourut le 11 décembre suivant, âgé de 75 ans, dernier membre du prieuré de Saint-André.
Il fut remplacé par M. Flament (Pierre-Joseph), qui administra la paroisse 4 ans et 7 mois, étant mort le 28 juillet 1836, âgé de 40 ans. Celui-ci fut remplacé par M. Paris (Louis-Nicolas), ancien desservant de Gauchin.
Cette nomenclature des curés de Witternesse ou d'autres paroisses pourrait d'abord paraître minutieuse, mais je la considère comme intéressante. En effet, ne serait-il pas à désirer d'avoir la chaine des curés qui ont dirigé une paroisse depuis son origine on au moins depuis quelques siècles? C'est pour commencer cette chaîne que j'ai indiqué les noms des curés de Witternesse, depuis la nouvelle organisation de la paroisse en 1802.
Je terminerai cette notice du prieuré de Saint-André par le tableau des prieurs qui l'ont gouverné jusqu'à sa suppression, en 1789.
La communauté procédait à l'élection de son chef avec les mêmes formalités qui se pratiquaient dans les abbayes. Le prieur, élu par la communauté, était nommé par le roi; il portait la croix pastorale comme les abbés.
1 - Odon, 1 prieur, en 1206 jusqu'en 1220.
2 - 1226 Jean I", jusqu'en 1254.
3 - 1254 Foulque, jusqu'en 1267.
4 - 1267 Nicolas de Bergues fut prieur 10 ans, abdiqua en 1277 et entra au couvent des Dominicains de Bergues.
5 - 1277 Gilles.
6 - 1277 Guillaume d'Aire.
7 - Beaudoin du Château.
8 - Guide d'Etrun dit Hannebiert.
9 - Gérard de Mory.
10 - Barthélemi de Cambrai.
11 - Jacques I dit Guisard.
12 - Radolphe, mort en 1346.
13 - 1346 André du Bois, mort en 1392.
14 - 1392 Jean II du Bois.
15 - Henri I" d'Andres, mort en 1420.
16 - 1420 Jacques II de Fontaine.
17 - Bierre Bouberel.
18 - Henri II de Lépine, mort en 1464.
19 - 1464 Roger le Douch.
20 - Jacques III le Fer.
21 - Jacques IV Guiselain, mort en 1520.
22 - 1520 Nicolas II Bernard, mort en 1550 (Le 14 février 1512, ce prieur fut choisi comme témoin de la limitation des paroisses de Saint-Pierre et Notre-Dame, à Aire.).
23 - 1550 François I", mort en 1571.
24 - 1571 Laurent le Petit, mort en 1581.
25 - 1582 Jean III Bronde, mort en 1596.
26 - 1596 Nicolas III Galiot, jusqu'en 1616.
27 - + Les noms des prieurs depuis 1616 jusqu'à 1729, ne nous sont pas connus.
28 - 1729 Jean IV de la Prouve, nommé par le roi Louis XV le 9 mars 1729, jusqu'en 1763.
29 - 1763 François II Oudermack, jusqu'en 1779.
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Collection : F Godart - ADCA Pierre tombale photographiée vers 2009 dans l'enceinte de l'abbaye |
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| Collection : F Godart - ADCA |
| Pierre tombale photographiée vers 2009 dans l'enceinte de l'abbaye |
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Suppression du Prieuré de Saint-André en 1789